La famille de FÉLICITÉ
Luce
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Félicité (1754-1820) aff av. 1787 = Joseph Nicolas PIROIS de CHAMPMAUNY (1752-1809)
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Louis CHAMPMAUNY (1787 -1828)
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Jean CHAMPMAUNY
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Marie Françoise CHAMPMAUNY (1792-1864) = Jean Baptiste BASCLE (1780-1855)
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Jean Victor BASCLE (1811 - 1851)
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Amynthe BASCLE (1814 - )
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Héloïse BASCLE (1818 - )
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Jean Baptiste BASCLE (1824 - )
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Marguerite Victorine BASCLE (1827 - 1843)
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Joséphine CHAMPMAUNY (1794- après 1831)
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Dernier ajout: janvier 2023
FÉLICITÉ
D'après les déclarations de ses fils lors du décès de leur mère, Félicité est née vers 1750 à Saint Paul, fille de Luce. Peut être était-elle l'esclave de la veuve Jean GRUCHET? Mme Gruchet baptise en effet une petite Félicité, fille de Luce, le 19 décembre 1754 à Saint Paul. Au recensement de 1765 (1a)., la veuve déclare également Félicité âgée de 4 ans (?), mais pas de Luce. L'année suivante, Félicité n'est plus mentionnée dans la succession de la veuve (1b). A t-elle été revendue au Chevalier Louis de Becdelièvre dès 1765 ?
Quoi qu'il en soit, il est avéré que Félicité est affranchie par M. Becdelièvre avant 1787. Louis de Becdelièvre, issu de la noblesse bretonne, est capitaine des vaisseaux de la Compagnie des Indes. Il voyage entre Lorient, les Mascareignes, la Chine et l'Inde depuis 1841. En 1870, il est débarqué malade à Saint-Paul, où il met fin à sa carrière de capitaine et s'installe en tant que propriétaire d'habitation (2). Les employés de la Compagnie des Indes pouvaient alors s'exercer au commerce d'Inde en Inde, exclu du monopole de la Compagnie, commerce qui pouvait devenir très lucratif (2b).. Becdelièvre dispose assurément de moyens importants, car lors du recensement de 1779, il déclare 489 esclaves sur son habitation de Saint Paul .
C'est probablement sur la propriété de Louis de Becdelièvre que Joseph Piroys de Champmauny rencontre Félicité, qui a sensiblement le même âge que lui. Joseph est originaire de Rennes. il a 20 ans lorsqu'il embarque à Lorient, sur le navire le Gange, en tant que volontaire sans solde, vers la Chine et les Indes. Il est décrit comme étant de taille moyenne, avec les cheveux châtains. En 1877, il est officier (lieutenant) sur le Navire Elisabeth et débarque à l'île de France (3). Il vit à la Réunion au moins depuis 1780, année où il se porte témoin pour le mariage à Saint Paul, d'un autre breton, Pierre Jacques Louis AUGEARD, chirurgien à la Compagnie, (4). Il repart ensuite vers la France et embarque Port Louis sur le navire l'Eléphant, en tant que volontaire d'honneur, sans solde. Joseph revient cependant assez vite à Bourbon, car en 1787, son fils Louis est baptisé à Saint Paul. Louis est déclaré fils de Félicité, femme Libre affranchie Becdelièvre, et de père inconnu, mais il se présentera et signera par la suite sous le nom de Louis Champmauny.
Entre 1792 et 1794, Félicité réside à Saint Louis où elle vit probablement maritalement avec Joseph Champmaury. Deux de leurs enfants y sont déclarés:
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Le 30 janvier 1792, sa fille Françoise est baptisée à Saint Louis. Ce sont les années révolutionnaires et le curé Lafosse accepte de reconnaître le père de l'enfant en dépit de l'interdit édicté par les Lettres Patentes de 1724. Le prêtre note dans l'acte de baptême: " Le père de l'enfant est Monsieur Joseph Piroys ci-devant Champ-mauny suivant un billet que m'écrit en date de ce jour le dit M. Champ-mauny et qui m'a été remis par le parrain et la marraine qui m'ont assuré que le père de l'enfant viendrait au premier jour". Le parrain est François Blérÿe, Marie Françoise PAYET, femme de Noël NATIVEL est la marraine.
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Le 14 août 1794, Joséphine, une autre fille de Félicité est déclarée à l'état civil par le "citoyen Louis et la citoyenne Marie Louise". S'agit-il de son fils Louis Champmauny, accompagné de Marie Louise, la mère de Sidonie, qui sera affranchie par ce même Louis le 7 septembre 1811? Quoi qu'il en soit, le nom du père de Joséphine n'est cette fois pas mentionné dans l'acte.
La couple a au moins un autre fils, nommé Jean, dont je n'ai pas pu trouver l'acte de naissance. Joseph Champmauny décède à l'âge de 56 ans en 1809 à Port Louis, en Île de France. Peut être Joseph s'adonnait-il au négoce et était en voyage d'affaire à Port Louis. Ou bien y résidait-il avec sa famille? C'est difficile à dire, car si ses deux filles, de 15 et 17 ans, semblent s' être installées en Île de France, son fils Louis est à Saint Pierre de La Réunion dès 1811 et sa compagne Félicité décède à Saint Pierre en 1820, à près de 70 ans. Ce sont ses deux fils, Louis et Jean, qui déclarent le décès de leur mère.
Les enfants de Félicité ont reçu de l'instruction: ils savent tous signer, même les filles, bien que Jean le fasse assez maladroitement. De plus, il s'approprient tous le patronyme de leur père, bien que les Libres n'avaient alors pas le droit d'utiliser des "noms blancs". Sabine Noël, dans son livre, Amours et familles interdites - Blancs et noirs à l'Île Bourbon au temps de l'esclavage, montre bien comment les Libres recherchaient activement, en dépit de tous les obstacles juridiques et sociaux, à obtenir le nom de leur père. Car ce patronyme blanc était utilisé par les Libres comme un "Sésame permettant d'intégrer la classe des Blancs. Le patronyme est revendiqué comme moyen identitaire d'intégration dans une lignée ascendante, et aussi de création d'une lignée descendante." (5) p217
Louis CHAMPMAUNY (1787-1828)
En 1811, Louis Champmauny a 23 ans et réside à Saint Pierre.
Le 12 juillet, il présente une requête pour affranchir son esclave Sidonie, âgée de 19 ans et fille de Marie Louise. Louis s'engage à la nourrir pendant 2 ans, à lui donner un terrain de 25 toises carré à St Pierre et à y faire construire une maison et une cuisine. Il lui donne aussi 2 esclaves : Jacques Denis, 35 ans, mozambique et Marie Jeanne, 30 ans, mozambique. Sidonie et Marie Louise ont elles un lien de parenté avec les Champmauny? Je n'ai rien trouvé qui puisse le confirmer.
Louis Champmauny décède à Saint Pierre, à l'âge de 41 ans. Ce sont deux hommes Libres qui déclarent son décès, Louis Eugène (Reilhac probablement) et Henry Prémont.
Marie Françoise CHAMPMAUNY (1792-1864)
En 1809, lorsque son père décède à Port Louis, Marie Françoise a 17 ans et réside peut être déjà à l'Île de France. Elle déclare en effet dans cette ville au moins la naissance de 3 enfants, dès 1811, puis en 1814 et 1819.. Leur père, Jean Baptiste BASCLE, qui a 12 ans de plus qu'elle, est un négociant originaire de Jonzac, en Charentes Maritimes. Depuis la fin du monopole de la Compagnie des Indes, en 1769, le commerce privé dans l'Océan Indien ne cesse de prendre de l'ampleur et de nombreux négociants s'installent dans les Mascareignes, charnière des échanges avec l'Inde et la Chine.
En 1810, les anglais se rendent maîtres de l'Île de France, qui retrouve le nom de Mauritius, sans que la vie quotidienne de ses habitants en soit boulversée pour autant. Le gouvernement britannique nouvellement installé choisit en effet de privilégier la paix sociale en maintenant la vie culturelle, la situation économique et le système judiciaire de la colonie. Les anglais sont peu nombreux sur l'île et le gouverneur Farquhar veille à ce qu'ils entretiennent de bonnes relations avec les élites locale, elites dont Bascle fait partie en tant que négociant. Le gouverneur ferme les yeux en particulier sur la poursuite de la traite à Maurice, traite pourtant officiellement abolie par la Grande Bretagne depuis 1807. Mais dès 1815, le gouverneur est obligé d'imposer un bureau des esclaves et surtout, une loi est promulguée, qui entraîne la fermeture du port de commerce étranger et met fin au libre échange, toléré jusque là.
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Les affaire de Bascle en ont probablement subit les conséquences et c'est peut être une des raisons qui poussent Jean Baptiste Bascle à décider de rentrer en France. Vers 1824, il rejoint sa ville natale, accompagné de Marie Françoise et de ses enfants. L'année suivante, le couple peut enfin officialiser leur liaison et reconnaître leurs enfants. Jean Baptiste semble avoir ensuite cessé le négoce et avoir amassé suffisamment de fortune pour investir dans la terre: il se déclare propriétaire des 1827, Lorsqu'il décède à Jonzac en 1855, il est rentier et adjoint au maire de Jonzac.
Leurs deux fils exercent eux aussi la profession de négociant. Jean Victor s'installe à Bordeaux, alors que Jean Baptiste est toujours à Jonzac en 1849. Les filles de Marie Françoise épousent respectivement un notaire et un chirurgien. On peut se demander si les enfants de Marie Françoise savaient que leur grand mère avait été esclave ou est-ce resté un secret de famille?
Marie Françoise décède en sa maison à Jonzac, à l'âge de 72 ans.
Joséphine CHAMPMAUNY (1794- après 1831)
En 1831, Joséphine se rend à Saint Louis pour obtenir un acte de notoriété confirmant sa naissance en cette ville. Bien que déclarée en 1794 "née de Félicité libre et d'un père inconnu" , elle déclare porter le nom de Champmauny et résider à Port Louis, à l'Île de France. Joséphine réussit ainsi à officialiser son patronyme.
SOURCES
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Registres de l'état civil, La Réunion et l'Ile de France, ANOM.
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(1a) Recensement 1765 Saint Paul, ADR, vue 94
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(1b) Robert Bousquet - Des esclaves et leurs maîtres à Bourbon au temps de la compagnie des Indes 1665-1767; 2011 - Livre 4, Tableau 7-5, page 235
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(2) Louis Becdelièvre - Équipages et passagers, Site Mémoire des Hommes
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(2b) LE BOUËDEC, Gérard ; et al. Les Compagnies des Indes et les ports-comptoirs (XVIIe-XVIIIe siècles) In : Les Européens dans les ports en situation coloniale : XVIe-XXe siècle [en ligne]. Rennes : Presses universitaires de Rennes, 2015 (généré le 27 décembre 2022).
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(3) Joseph Chamony - Équipages et passagers, Site Mémoire des Hommes
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(4) Augeard - Équipages et passagers, Site Mémoire des Hommes
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(5) Sabine NOEL, Amours et familles interdites - Blancs et noirs à l'Île Bourbon (La Réunion) au temp de l'esclavage (1665-1848), Les Indes Savantes, 2022